Intérieur cuir
mardi 8 décembre à 18h
L’espace moteur. A propos du travail de Delphine Reist et Laurent Faulon.
Les futuristes louaient le bruit des moteurs. Marinetti, qui posait volontiers au volant de voitures de sport, assimilait dans son manifeste de 1909 le progrès des arts à la sensation roborative de la course folle d’une automobile se terminant, après une ultime embardée, au fond d’un fossé plein d’une saine « boue des usines ». La foi artistique de Delphine Reist et Laurent Faulon dans le progrès industriel est en revanche peu avérée. Les artistes semblent plutôt collecter des symptômes d’une civilisation productive malade de ses promesses, dont ils traversent les lieux désaffectés, composant avec les signes matériels d’une histoire mise entre parenthèses et inhabitée, mais où les choses vibrent malgré tout, comme attendant leur réaffectation, dans le double sens d’une refonctionnalisation et d’un réinvestissement subjectif.
Voilà pourquoi, dans les travaux de Reist et Faulon, le médium est machine. Il ne fait forme, en effet, que sous certaines conditions de fonctionnement. Qui plus est, ce fonctionnement est matériel, non pas seulement symbolique. Autrement dit, il ne leur suffit pas, pour faire œuvre, d’inscrire pragmatiquement l’objet dans un contexte symbolique où les signes s’interprètent comme art, à savoir dans le cadre du monde de l’art, des galeries ou des musées. Pendant des années, ces lieux ont été systématiquement évités par les deux artistes. Terrain vague, parking, usine abandonnée… c’est dans ces non-lieux que l’œuvre doit fonctionner, de façon autonome, pour autant que la mécanique des choses opère de façon particulière. Régler la mécanique des choses selon des paramètres matériels et spatiaux qui obligent à réaffecter les lieux de l’économie ordinaire de la vie sociale, en en faisant sentir la vacuité même, tel pourrait être le programme implicite des pièces de Reist et Faulon. Or, le moteur joue dans ce réglage un rôle autant d’instrument que de motif. (...)
Extrait du texte inédit L’espace moteur, David Zerbib, 2013.
Mardi - Samedi : 14h / 18h
Exposition visible uniquement depuis l’extérieur du 19.12.15 au 9.01.16